31 octobre 2012

La fièvre de l’hévéa

La nouvelle spéculation agricole à la mode en cote d’ivoire est l’hévéaculture. Tous les agriculteurs, comme moi, et tous ceux à la recherche d’une rente sure et régulière, sont informés des formidables performances économiques de l’hévéaculture. Les plantations d’hévéa poussent comme des champignons.

La fièvre de l’hévéa, cette machine à faire du cash, fait chemin, tournant les têtes, remplaçant certaine culture moins rentable.

« Pourquoi t’embêter avec les poulets, fais de l’hévéa, t’es tranquille, y a peu de risque et ça rapporte gros » m’a-t-on souvent, gentiment, mais avec insistance, conseillé. Mais hélas à Toumodi, en pleine savane, l’hévéa ne pousse pas. Sinon, j’aurais été aussi un hévéaculteur. Alors l’argent, beaucoup d’argent dans mes poches, à vrai dire seulement dans quelques années, seulement, le temps coule si vite dans ces cas là.

Mais, mon petit séjour ce weekend, dans la ville de Dabou, me fait voir les choses autrement.

Dabou, est une petite ville, a peu prés 45 Km d’Abidjan. Pour ceux d’Abidjan, Dabou évoque deux choses : la sorcellerie, l’Attiéké. La sorcellerie, n’en parlons surtout pas, mais allons pour l’Attiéké.

Tout le monde mange de l’Attiéké en Cote d’ivoire, un plat fait avec de la farine de manioc cuite à la vapeur. Ça se vend partout, et c’est très consommé, par toutes les couches sociales.

Dabou est celébre, pour la qualité et la quantité de son Attiéké. Du manioc d’une variété délicieuse, des mains expertes pour préparer la farine, des recettes secrètes jalousement préservées, et voila l’Attiéké le plus fabuleux de tout le pays.

Donc j’arrive à Dabou, le ventre vide, avec en tête le plat d’Attiéké à l’huile rouge qu’accompagne une sauce légère au poisson. J’appelle l’amie qui me reçoit, préviens de mon arrivée dans l’heure, et insiste sur l’état de mon ventre et de mon appétit.

A ma grande surprise, après les salutations d’usages, vite liquidées, mon ami me présente un plat de riz. A ma mine déconfite, je l’entends dire :

– « ya plus Bon Attiéké à Dabou déh »

– « pourquoi ? »

– « y a plus bon manioc »

– « pourquoi ? »

– « mon frère, humm, c’est Hévéa tout le monde plante ici maintenant. Tous les champs de maniocs sont devenus champs d’hévéa. La tantie qui fait bon bon Attiéké, elle prend manioc à Dimbokro maintenant, »

Pour les cultures d’exportations les cultures vivrières sont encore négligées, pour du caoutchouc, je n’ai pas eu mon Attiéké.

Continuons, cultivons pour les autres, oublions ce dont nous avons besoin, ce que nous mangeons. Cultivons pour exporter seulement, comme le dit le cousin de mon ami « c’est caoutchouc nous allons manger ».

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